Besoins en logements et programmation

Accessibilité, localisation du parc et mixité sociale : le trio infernal

C’est un objectif du logement social qui ressemble malheureusement souvent à un vœu pieux : proposer à chaque demandeur une offre accessible et confortable, et au bon endroit pour organiser une mixité de peuplement.

Il y a un an, on parlait déjà de ce sujet dans un billet d’humeur au titre clair sur nos intentions : « Mixité sociale : ne baissons pas les bras ! »  On rappelait le sens de notre action à tous, bailleurs et acteurs du logement : œuvrer à ce que des ménages puissent accéder à un logement décent et adapté à leurs besoins.

Malheureusement, un an plus tard, force est de constater que les choses n’ont pas fondamentalement changé. Et il est même devenu plus compliqué encore de produire des logements abordables pour tout un tas de raisons conjoncturelles. Une majorité de ménages fragiles se voient toujours attribuer un logement social dans les quartiers Politique de la ville (QPV), alors qu’il s’agit d’éviter de concentrer les ménages les plus pauvres dans ces quartiers.

Mais on a tout de même pu avancer sur certaines pistes que l’on souhaitait vous partager.

Alors mixité sociale, d’accord, mais comment ? Nous identifions 3 axes d’intervention principaux.

Favoriser les parcours résidentiels et la mobilité dans le parc

Atteindre un certain équilibre de peuplement demande une connaissance fine du parc et de ses occupants. Au-delà des ressources des locataires, la composition familiale ou encore l’âge sont autant d’items permettant de caractériser le profil du locataire.

Avoir cette visibilité à l’échelle de la résidence, grâce aux outils mais surtout grâce à la présence du bailleur sur site, permet de cibler des profils de demandeurs adéquats, tout en respectant les critères réglementaires de ressources.

A ce titre, la gestion en flux et la cotation seront des outils supplémentaires pour prendre une décision d’attribution, en tenant compte de cet objectif de mixité autant que possible (choix du réservataire ; prise en compte des éléments de cotation, indicateurs du niveau de priorité selon les critères en vigueur dans l’EPCI…)

Intervenir sur les loyers

Consigne était donnée aux préfets dans une circulaire du mois de décembre dernier d’accompagner et de soutenir les initiatives des bailleurs volontaires pour mettre en place une nouvelle politique des loyers (NPL). Un des objectifs est de loger en dehors des QPV plus de ménages dont les ressources ne dépassent pas les plafonds PLAI, et en QPV plus de ménages dont les ressources sont supérieures aux plafonds PLAI mais inférieures aux plafonds PLS.

Nous travaillons par exemple sur le sujet avec Brest Métropole Habitat : l’offre accessible aux ménages à faibles ressources est déjà importante dans le patrimoine global, mais une analyse au quartier laisse apparaitre une concentration de profils similaires sur certains secteurs. Deux approches :

  • d’un côté, accompagner les mutations de quartier, anticiper les réhabilitations et raisonner au bâtiment pour identifier les adresses plus attractives où attirer des profils moins fragiles, pouvant tolérer des hausses de loyers à terme,
  • d’un autre côté, réintroduire hors QPV des baisses de loyers pour retravailler le peuplement.

Adopter une approche croisée avec les autres politiques publiques

Historiquement, les raisons de la non-mixité dans les quartiers prioritaires sont connues : manque récurrent d’équipements publics et de commerces, problématiques de mobilité sur des quartiers souvent éloignés du centre-ville, etc. On peut noter en contrepoint un attachement au quartier de la part des habitants et la présence de réseaux de solidarité qui facilitent le quotidien.

C’est ce qui ressort notamment d’un travail que nous avons mené avec la Métropole de Lyon, où l’on constate que les logements sociaux des communes de l’ouest lyonnais, communes aisées et bien équipées, font l’objet de davantage de refus. En cause : une localisation à l’opposé des grandes zones d’emploi – qui impose de disposer d’une voiture- et des temps de trajet importants, ainsi que l’absence de ces réseaux de solidarité locaux.

Ainsi l’atteinte d’une mixité sociale est-elle à réfléchir dans sa globalité, en lien avec les autres politiques publiques, afin de favoriser les mobilités et les accès aux services publics et ainsi rendre réellement accessible le « hors QPV ».

En conclusion 

La réflexion autour de la mixité sociale se concentre souvent sur les premiers quartiles de revenu et leur représentation hors des QPV. Des pistes de travail existent pour maintenir, voire développer, une offre de logements accessible sur l’ensemble d’un territoire.

La question de la mixité passe toutefois aussi par une diversification des profils de population dans les quartiers prioritaires. Changement d’image, renouvellement de l’offre de logements, services et commerces, aménagement urbain… : autant d’axe traités depuis maintenant vingt ans dans nombre de quartiers au travers des programmes de renouvellement urbain successifs.

Pour le bailleur, cela implique également une stratégie patrimoniale adaptée et des modes de commercialisation davantage proactifs pour attirer de nouvelles populations : annonces postées sur les plateformes de location, actions de communication sur le logement social et ses cibles diversifiées, prise de contact avec les employeurs majoritaires sur le territoire…

On en discute ?

Etienne BALEY

Consultant senior

Cléa ROUIRE

Consultante senior

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